Libre-R et associés : Stéphanie - Plaisir de lire

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Stephen Orr : Le temps n’efface rien

Le temps n’efface rien de Stephen Orr       5/5 (18-08-2012) 

 

Le temps n’efface rien (585 pages) est paru aux Editions Presses de la Cité le 16 août 2012.

Un immense merci à Abeline et à l’évènement Chronique de la rentrée littéraire qui m’ont permis de faire connaissance avec Stephen Orr et son bouleversant Le temps n’efface rien. J’ai un vrai coup de cœur pour ce livre dans lequel absolument tout m’a plu.

 

 

 

 

L’histoire (éditeur) :


A neuf ans, Henry est un garçon solitaire ; son pied-bot l'empêche de partager les jeux des enfants de son âge. Cet été-là, comme à son habitude, il reste dans sa chambre, lit beaucoup et ne fréquente que sa jeune voisine, Janice. Le jour de la fête nationale, elle lui propose de l'accompagner à la plage avec son frère et sa sœur. Henri, complexé, refuse. Les quatre enfants ne se reverront jamais. Un roman qui parle d'amitié, d'amour et de la difficulté de continuer à vivre après un drame. Inspiré d'un fait divers jamais résolu qui continue de hanter toute une population, Le temps n'efface rien dresse un portrait doux-amer de l'Australie des années 1960.


Mon avis :


Le temps n’efface rien est un roman qui prend ses bases dans un fait divers jamais résolu : la disparition de Jane, Arnna et Grant Beaumont, en 1966 aux alentours d’Adélaïde. Stephen Orr a choisi de construire son livre en deux parties : l'avant et l'après.

 

La première présente le lieu et les personnages et nous entraine en 1960 à Croydon. C’est les vacances scolaires et le jeune Henry, 9 ans, passe son temps entre lecture et écriture dans le clapier à lapin de son jardin, son travail pour Gino, le gardien du passage à niveau (à la surveillance de l’arrivée des trains), son travail chez le docteur Gunn (dans le classement de livres qui composent sa future bibliothèque) et surtout sa grande amie Janice Riley. Elle vit dans la maison d’à côté avec Bill et Liz, ses parents, et Gavin et Anne ses jeunes frères et sœurs. Henry et Janice sont très proches, au point qu’elle refusera d’avoir un vélo pour soutenir moralement son ami qui ne peut pratiquer d’activité physique à cause de son pied bot. Le récit est celui de la vie de quartier tout simplmeent, entre les querelles de voisinage, les bêtises de certains enfants (petits larcins chez l’épicier), et les sorties à la plage. Durant toute cette première partie, le lecteur est vraiment transporter dans ses années soixante en plein Australie où la chaleur est écrasante. C’est détaillé mais pas au point de générer une lassitude. Au contraire, les mœurs et les mentalités collent parfaitement à l’époque. Les lieux sont dépeints avec une telle précision qu’on a l’impression de faire partie de cette petite communauté de Thomas Street où l’insouciance prédomine.

 

La deuxième partie commence le jour de l’Australian Day, la fête nationale du 26 janvier. Janice, Anne et Gavin se rendent seuls à la plage parce que ni leur mère ni leur père ne peuvent les accompagner et parce qu’ils « apprennent à être autonomes ». Henry quant à lui refuse, prétextant la préparation de son sac pour la rentrée scolaire alors qu’en réalité il est juste question de peur de la baignade liée à son handicap. Personne de reverra les trois enfants.

Toute la communauté s’active dans les recherches. L’enquête, dirigée par le père d’Henry, l’inspecteur Bob Page, dure des jours, des semaines, des mois…mais piétine. Entres les témoins peu fiables, les battues et les recherches infructueuses, et les témoignages qui se contredisent c’est l’espoir de les retrouver vivants qui s’amenuise et l’enquête qui s’essouffle.


Stephen Orr ne s’attache pas seulement à traiter l’enquête sous un œil professionnel (celui du fils de l'enquêteur), c’est aussi l’occasion d’évoquer les doutes et les suspicions qui pèsent sur certains habitants du coin. Il  oriente aussi son récit vers les sentiments de chacun, habilement décrits à en devenir palpables : la douleur et la colère des parents des disparus, le chagrin des voisins directs (notamment Rosa et Gino, Bob et Ellen et surtout Henry), la culpabilité, la cupidité (des journalistes et des pseudos voyants) et la curiosité macabres des badauds. Cette disparition, aussi brutale et mystérieuse, est pleine de conséquences, entrainant des réactions et révélant des secrets. Mais la vie suit toujours son cours et même si le temps n’efface rien la vie continue.


C’est tout ça que j’ai adoré.  Le fait de me sentir impliquée dans la vie de ce quartier et suivre le récit d’Henry. Je suis totalement tombée sous le charme de ce petit garçon si attachant ! Il est intelligent, passionné (par les livres et par son père), heureux (et pourtant  loin d’être épargné par la vie : handicapé et trop souvent rejeté par sa mère car lui rappelant son propre handicap), mais doit maintenant vivre avec le fardeau de la disparition partagé entre espoir, désespoir, culpabilité et solitude. Il ne sombre pas car il refuse de faire comme si tout était finit : Janice restera toujours à ses côtés.


L’écriture est très prenante  et le fait d’utiliser le garçonnet comme narrateur donne beaucoup de sensibilité au livre. Une fois commencé il m’a été bien difficile de le poser. Une fois refermé, il a même continué à me travailler.  J’ai attendu désespérément un signe, une preuve, un tout petit rien. J’en ai encore le cœur serré car il n’est pas juste question de disparition mais aussi de dépression, de violence domestique, de pédophilie, de maltraitance et de toutes les suppositions que l’on peut faire autour de ce drame. 


Un roman poignant que je vous conseille vivement de découvrir.

 

 

 

 

 

 

« Quand j’y repense aujourd’hui, je me dis que, paradoxalement, ce drame nous a peut-être aussi fait du bien. Il nous a permis de renforcer nos liens d’amitiés. Il nous a rappelé à quel point il est simple de se montrer généreux. Il nous a fait oublier le prix de l’essence et les taches sur la moquette de la salle à manger. Tout le quartier s’y est mis, même moi : je m’installais au salon avec Liz pour lui lire Peter Pan (un choix peu judicieux, comme je le compris un peu plus tard, amis elle éclata de rire quand je lui avouai, et me supplia de continuer). » page 501


 

« Dites-leur aussi que la vie continue, pensa t‘elle. Envers et contre tout. Et que ce qui compte finalement, ce n’est pas ce dont elle nous a privés, mais ce qu’elle nous a offert. Qu’il en a toujours été et qu’il en sera toujours ainsi pour toutes les créatures terrestres – hommes, femme, chien ou cafard. » page 569

 

 




19/08/2012
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